IBN GABIROL

IBN GABIROL
IBN GABIROL

IBN GABIROL SALOMON (1020 env.-1057)

Poète et philosophe juif espagnol en qui les Latins virent un penseur arabe du nom d’Avicebron, Shel 拏m 拏h ben Yehud h ibn G face="EU Caron" ガbirol (Gabirol) est probablement né à Málaga, mais il fut amené encore enfant à Saragosse, où il reçut son éducation; il était orphelin de père dès son jeune âge et perdit sa mère à vingt-cinq ans. Doté d’une frêle constitution et souvent sujet à des maladies, il mena une existence difficile de poète et de philosophe, subvenant à ses besoins grâce à de riches protecteurs. Il mourut sans doute à l’âge de trente-cinq ou de trente-huit ans.

La personnalité d’Ibn Gabirol exprime une dualité curieuse: il figure dans l’histoire de la littérature et de la pensée juives en tant que poète profane et religieux et comme auteur d’une compilation de morale philosophique, cependant qu’il apparaît chez les Latins, sous le nom d’Avicebron, comme un philosophe arabe auteur d’un important traité de métaphysique, le Fons vitae (La Source de vie ). Cette dernière œuvre fut accueillie avec faveur dans la scolastique latine (en particulier par saint Thomas d’Aquin) mais fut presque complètement ignorée dans son original arabe (Yanb ‘ al- ムay t ) par les coreligionnaires de l’auteur. Ce n’est qu’au XIXe siècle que Salomon Munk identifia l’Avicebron (Avencebrol) des auteurs chrétiens avec Shel 拏m 拏h ben Yehud h ibn G face="EU Caron" ガbirol des auteurs juifs.

L’œuvre poétique d’Ibn Gabirol manifeste une grande connaissance de l’hébreu biblique et un parfait maniement de toutes ses ressources. Bien que reprenant à l’arabe des images et des expressions, cette poésie porte la marque d’un style original. Toute la spiritualité de la littérature, tant biblique que midrashique, s’y laisse entrevoir. Par ses tendances mystiques, elle s’apparente aux poèmes des ル fi. Certes, les connaissances scientifiques et astronomiques du poète s’y reflètent aussi. La plupart des poèmes profanes d’Ibn Gabirol ont été composés en l’honneur de ses riches protecteurs, et l’on y découvre d’extravagants panégyriques. L’auteur se considère lui-même comme un violon, parmi tous les chanteurs et musiciens, et pense que c’est à lui seul que les portes de la sagesse se sont ouvertes. Suivant les conventions de la poésie arabe, il met en relief d’une manière pessimiste le contraste entre sa condition solitaire et la vanité du monde. Lorsqu’il enseigne la sagesse, ses accents sont empruntés au néo-platonisme. Il prépare son âme à s’échapper de son enveloppe corporelle en direction de la «Source de vie». Il insiste souvent sur le caractère passager de l’existence et oppose celle-ci à la condition immortelle de l’âme. La nature ne lui est pas indifférente, ainsi qu’en témoignent ses poèmes sur les saisons.

Sa poésie religieuse, où il combine l’hébreu le plus pur selon la métrique de l’art poétique arabe, comporte des poèmes qui figurent parmi les plus beaux de la liturgie juive médiévale et que l’on retrouve non seulement dans les rituels ashkenazes et sefarades, mais même dans les livres de prières des karaïtes. Sa relation à Dieu s’établit à travers le sentiment qu’il a de la finitude de l’être humain et qui contraste fortement avec la fierté qu’il exprime dans ses poèmes profanes. Son amour pour le peuple d’Israël et son ardente croyance messianique s’y révèlent, ainsi que beaucoup d’éléments mystiques empruntés au S 勒f 勒r Ye ルirah et aux Heykalot . Enfin, Ibn Gabirol donne, dans son grand poème «La Couronne royale» (K 勒ter Malk t ), une expression poétique à sa propre pensée métaphysique formulée dans le Fons vitae .

Son œuvre philosophique comporte d’abord un petit traité de morale, le Tiqq n midd 拏t ha-n 勒ph 勒š (L’Amélioration des qualités de l’âme ), dans lequel, après avoir établi un parallèle entre le microcosme et le macrocosme, Ibn Gabirol institue une relation entre les cinq sens et les traits de la personnalité, ainsi qu’entre les vertus et les quatre éléments. Mais la grande œuvre du philosophe espagnol est son M face="EU Caron" ガqq 拏r ムayy 稜m (La Source de vie ), préservé dans sa traduction latine médiévale sous le titre de Fons vitae . Le M face="EU Caron" ガqq 拏r ムayy 稜m se présente sous la forme d’un dialogue entre un maître et son élève et se trouve divisé en cinq traités.

Le système a une structure générale néo-platonicienne, mais celle-ci se trouve modulée tant par la pensée personnelle d’Ibn Gabirol que par les exigences de ses croyances juives. Le principe ultime, pour celui-ci, est l’essence première identifiée avec Dieu, qui est en soi inconnaissable en raison de son infinitude mais que l’on peut appréhender à travers les œuvres qu’il a produites. Entre l’essence première et le créé, Ibn Gabirol place son intermédiaire: la volonté divine. Elle est la force divine qui confère son être à toutes choses. Elle crée la matière et la forme, leur sert d’intermédiaire et ordonne toutes les créatures. De la volonté procèdent la matière universelle et la forme universelle, puis les substances simples — intellect, âme et nature — et, finalement, le monde corporel en toutes ses parties.

Toutes les substances, qu’elles soient corporelles ou spirituelles, sont composées de matière et de forme. La matière est le substrat qui supporte les formes qui lui sont inhérentes. L’intelligence universelle est le produit de l’union de la forme et de la matière universelles et elle se trouve composée elle-même de matière et de forme. L’âme procède à son tour de cette intelligence et se diversifie en âme rationnelle, en âme animale et en âme végétative, aussi bien sur le plan du cosmos qu’au niveau anthropologique. La nature émane de l’âme végétative et constitue l’intermédiaire entre le monde intelligible et le monde corporel, lequel occupe la place inférieure dans la hiérarchie de l’être. La substance corporelle est le substrat de neuf des dix catégories d’Aristote. La dixième catégorie, la substance, s’identifie avec la matière universelle telle qu’elle apparaît dans le monde corporel, les neuf autres jouant par rapport à elle le rôle de la forme universelle. Les cieux servent de médiation entre l’âme universelle et le monde corporel.

La forme de l’intellect comprend toutes les formes et les inclut, mais elle n’atteint que difficilement à celles de la forme et de la matière universelles placées au-dessus de lui, a fortiori à la volonté divine et à l’essence première. La finalité vers laquelle tend tout esprit est la connaissance, c’est-à-dire la connaissance de soi-même en vue de parvenir à la félicité. Par la connaissance et l’action, l’âme se rattache au monde supérieur d’où elle est tirée, après s’être libérée de sa gangue matérielle et de l’absurde des choses d’ici-bas. Grâce à cet effort de déliement, l’âme parvient à rejoindre la «Source de la vie».

On perçoit comment Ibn Gabirol tenta de réaliser une synthèse entre la vision religieuse du monde du message biblique et le néo-platonisme médiéval. Cet effort l’amena à poser en principe une initiative de l’Être suprême, une création des échelons les plus élevés de l’être extra-divin par la volonté divine, création qui s’accordât avec un néo-platonisme repensé et logicisé, où l’universalité de la matière et de la forme, du haut en bas de la hiérarchie des êtres, découle d’un statut ontologique accordé au genre, en rupture avec la signification purement logique que celui-ci prend dans l’aristotélisme.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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